NOUS ÉTIONS UNE ARMÉE

Jeudi 20 novembre à la Maroquinerie, nous étions une armée.

Maro pleine, à peine un mois après la sortie de leur premier album, mais le ciel est sublime. On nous avait prévenu que ce concert serait important. Mais avant de les voir à l’œuvre, on n’aurait pas pu saisir à quel point.

Nous étions une armée, c’est Léo Nivot et Rémi Le Taillandier : un duo parlé-chanté, post-rock poétique en français, quelque part entre Diabologum, Feu! Chatterton et Fauve. Étonnant d’être seulement deux avec un nom pareil – et pourtant, sur scène, il se passe quelque chose de plus grand qu’eux, de plus grand que nous.

À gauche, Léo au chant et à la guitare. À droite, Rémi à la guitare, à la basse, aux chœurs et aux machines. Et en fin de concert, une surprise : leur directeur musical et ingé son Jean-Baptiste les rejoint au piano, tandis que Rémi passe à la clarinette – un final inattendu qui achève de nous retourner.

© Julien Leguay

Ils n’avaient pas besoin d’être plus nombreux que ça pour tenir la promesse de leur nom : ce soir-là, on s’est pris en pleine face la sincérité de mille hommes. Tout était joué avec les tripes, sans filtre, sans recul. Léo nous assénait autant de baffes qu’il s’en donnait physiquement.

Quand ils entonnent “j’aimerais que tout s’arrête ici”, nous, on pense tout l’inverse : on ne veut surtout pas que tout s’arrête pour eux. Parce qu’il se passe quelque chose de rare, de précieux, de contagieux – un concentré brut d’humanité qui circule en chacun et chacune de nous.

Leur nouvel album mais le ciel est sublime prenait alors tout son sens. Ils nous l’ont dit eux-mêmes : c’est ce qui vient compléter chacune de leurs phrases, comme une lumière obstinée plantée au bord du gouffre : “j’aimerais que tout s’arrête ici, mais le ciel est sublime”, “j’ai le cœur brisé en quatre, mais le ciel est sublime”, “il n’y a aucun espoir, mais le ciel est sublime”…

Une manière de dire que le désespoir n’annule pas le reste. Qu’on peut reconnaître la souffrance, la purger en criant ensemble. Qu’il peut ne rester “aucun espoir”, et pourtant…

Quand Léo chante, avec ce demi-sourire presque ironique, la musique répare tout, non?”, on pense : peut-être pas tout. Mais quelque chose, oui.

En tout cas, nous, ce soir, elle nous a réparé·es un peu. Juste assez pour tenir, pour se sentir moins seul·es dans le froid qui revient. Juste assez pour se souvenir que, malgré tout, nous avons de l’or sur la peau. Et surtout, que nous sommes plus vivants que jamais.

Et c’est peut-être ça, la vraie promesse de nous étions une armée : ce retour perpétuel à la lumière, même ténue, même brisée.

En concert le 28 novembre 2026 à la Cigale.

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