Nous avons eu le plaisir de rencontrer Lisa Ducasse à l’occasion de sa venue à Rennes pour le Festival Bars en Trans vendredi 9 décembre 2022.
AAS : Bonjour Lisa, Rennes c’est la première fois pour toi ?
LISA DUCASSE : A Rennes oui, mais j’ai joué en avril dernier à Poligné pas trop loin, pour le off d’un festival qui s’appelle « On lâche rien sauf les Chiens », c’était très chouette.
AAS : Peux-tu te présenter Lisa ainsi que ton projet ?
LISA DUCASSE : Je viens de l’Île Maurice et cela fait sept ans que je suis installée en France. Je suis arrivée dans musique par le biais de l’écriture. J’écris depuis très longtemps et j’ai commencé par la performance de texte, d’influence plutôt anglophone, ce que l’on appelle le spoken Word. En arrivant à Paris j’ai rencontré tout un groupe d’expatriés poètes, artistes, musiciens qui se réunissaient toutes les semaines dans la cave d’un bar pour dire des poèmes. J’ai donc commencé comme ça. Puis il y a eu des rencontres avec des musiciens avec qui je travaillais plutôt sur du texte et puis petit à petit j’ai basculé vers l’écriture de chansons. Je me suis toujours vu écrire parce que ça a toujours été présent et la musique est arrivée un peu plus tard.
AAS : Pourtant tu joues des instruments sur scène donc tu es venue à la musique à un moment donné ?
LISA DUCASSE : Oui, j’ai pris des cours de piano classique quand j’étais petite, il m’en reste très peu de choses (rires). J’ai repris en autodidacte il y a 5 ans. Le piano est un instrument que j’aime beaucoup même si je joue du clavier sur scène. La reprise du piano pour la chanson est beaucoup plus récente. Cela fait un an et demi que je m’accompagne sur scène.
AAS : Au niveau du genre de musique on parle de spoken word. Ce n’est pas du slam, ce n’est pas du rap, c’est une autre façon de scander des textes. Pourquoi avoir choisi cette esthétique ?
LISA DUCASSE : Je pense avoir été beaucoup influencée par des artistes anglophones comme Sarah Kay, qui était la porte-parole du genre pendant de nombreuses années aux Etats-Unis. La différence entre le spoken word et le slam ce sont les conditions de naissance. Le slam est né comme une compétition. L’aspect compétitif a toujours été présent à la base même si maintenant il se pratique hors compétition. Il y a un côté revendicatif dans les textes slam, on essaie de prouver quelque chose, d’être le plus fort. Dans le spoken word en comparaison, il y a plus un soin de l’image, qui relève souvent du domaine de l’intime, du personnel. Il y a aussi tout un travail avec le slam sur le son et l’oralité. J’écoutais déjà du spoken word avant de venir en France puis j’ai trouvé une plateforme ici pour commencer à pratiquer. Cela a beaucoup influencé mon écriture dans le sens où ce n’est pas du tout la même chose d’écrire pour être lu et d’écrire pour être entendu. Et c’était encore une fois un pas vers la musique. Être un peu à la croisée de ces deux mondes là, c’est quelque chose qui me sert encore aujourd’hui beaucoup sur scène et dans ma façon d’interpréter.
AAS : Le voyage est omniprésent dans ton écriture. A quel moment écris-tu et d’où vient l’inspiration de tes chansons ?
LISA DUCASSE : Il y a beaucoup de morceaux que je joue en ce moment en concert que j’ai écrits et composés en 2019 lors de mon voyage en Amérique Latine. C’était assez particulier car je n’ai pas composé pendant le voyage lui-même, mais juste avant la fin du voyage. Je me suis dit que j’allais rentrer à Paris et retourner dans un autre rythme, sans avoir eu le temps d’infuser certaines choses. Je me suis donc rendue dans un village côtier du Chili à Pichilemu. C’est la seule fois dans ma vie où tout était dirigé vers la composition, où j’ai pris le temps de raconter presque un an de voyage. Je me suis dit c’est maintenant qu’il faut que je le fasse. Je composais quasiment un morceau par jour. Beaucoup de mon inspiration vient de là, de ce lieu et de ce moment de vie.
AAS : Quelle est la suite de tes projets Lisa ?
LISA DUCASSE : En ce moment je fais surtout du live. En 2023 il y aura des premières parties avec Pomme. J’ai vraiment hâte car c’est une artiste dont j’aime beaucoup le travail et je pense que ça va être très beau à vivre. Je vais aussi travailler avec Bénédicte Schmitt en studio pour l’enregistrement de la reprise d’une chanson de Brel que je fais en live en créole mauricien, avec Anne Paceo pour les arrangements. C’est une première étape de travail avec cette équipe.
AAS : Te projettes-tu avec d’autres musiciens sur scène ou as-tu encore besoin d’approfondir ton projet en solo ?
LISA DUCASSE : Pour l’instant, ça me plait beaucoup de jouer seule. Ça correspond bien à ce qui est raconté et au fait de dérouler le voyage. Il y a un aspect un peu conté dans mes sets et ça fonctionne bien en solo. Je pense que j’ai envie de continuer à approfondir le travail que je peux faire toute seule. Mais après dans le long terme, j’aimerai bien aussi connaître la communion et le partage qui peut exister avec le fait d’avoir des musiciens sur scène et de partager un moment de musique. Je pense que cela viendra plus tard, mais pas tout de suite.
AAS : Un ARTISTEASUIVRE à nous conseiller ?
LISA DUCASSE : En ce moment, j’écoute beaucoup une artiste qui s’appelle Hohnen Ford, elle a sorti un EP Infinity que j’écoute en boucle avant de dormir. Il y a quelque chose dans sa voix et ses textes. Il y a énormément de petites variations mélodiques dans ses morceaux qui me calment beaucoup. C’est intéressant parce que c’est ce qu’on peut me dire de ma musique, des gens qui viennent me voir en concert, qu’il y a quelque chose de très apaisant. Je pense que nous sommes dans une phase où on assume beaucoup plus le fait d’avoir besoin de douceur et d’apaisement, de ne pas voir la douceur comme une faiblesse et de ne pas être dans un besoin de force constant. On commence à le percevoir comme quelque chose de courageux, ce choix de la douceur. C’est quelque chose que je retrouve chez Hohnen Ford et qui personnellement me parle beaucoup.